Autour de la Peur
Seule et transie la Peur devient bleue. Elle veut du réconfort mais n’en trouve aucune source. Elle entend au loin des coups de marteau sur une enclume. « Tiens, se dit-elle, enclume appelle forge et forge appelle chaleur et présence d’un frappeur, le forgeron. Allons voir ».
À travers les vapeurs entourant la forme humaine elle reconnait Tor.
- Grand Tor, lui dit-elle, je suis seule et j’ai peur! Je suis bleue d’effroi, peux-tu me réchauffer?
- Ma foi, tu es bien jolie et tu joues le sapeur sur mes forces toutes concentrées sur mon désir pour toi.
- Tu veux bien t’occuper de moi? Dit-elle, peureusement.
Tor s’approche de la petite apeurée et lui souffle doucement sur les doigts, sur la nuque, sur les joues. Elle sent l’envahir une douce torpeur et devient très malléable entre les bras puissants du forgeron. Tel le trappeur, il tend ses rets et bientôt, à sa grande stupeur, Peur se sent toute ragaillardie et prête à toutes les aventures.
Il pourrait se muer en kidnappeur mais préfère adopter un calme trompeur.
- Écoute j’ai un goût féroce de redevenir campeur, veut m’accompagné? Je suis assez bon auto-stoppeur, mon charme sans doute.
- Où veux-tu aller?
- Ma foi, les Rocheuses me plairaient; je suis assez bon grimpeur et je vois déjà un estampeur nous mettre en tableau à flanc de montagne.
- Tu ne crains pas les coupeurs de gorge dans ces lieux sauvages?
- Non, ils auront peur d’y venir.
Derechef, Tor et Peur prennent, sans peur, le chemin des Rocheuses…et de l’amour.